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Le Japon du Sud en train

par Jérôme Klein

Spécialiste du Japon certifié par le JNTO


On a tous le goût de partir. La passion du voyage nous incite à partager une fois encore l’émotion d’une aventure. Et si nous prenions un billet de train pour le sud du Japon? Je vous emmène aujourd’hui à Kyūshū, la troisième plus grande île de l’archipel.

Au Japon on voyage très souvent en train. C’est ici le moyen de transport par excellence. Notre voyage débutera à la gare de Hakata en direction de Yame, petite ville de montagne. Puis nous visiterons la station thermale de Yufuin ainsi que la région volcanique du mont Aso. Nous poursuivrons vers le sud en passant par Kumamoto puis Hitoyoshi, célèbre pour ses temples, avant de rejoindre Kagoshima puis Ibusiki, notre dernière étape à la pointe sud de l’île.

Au Japon, voyager en train et tout un cérémonial. La plus grande solennité est de règle dans les tâches les quotidiennes. Avec un souci d’efficacité redoutable, la brigade de nettoyage n’a que quelques minutes pour le ménage de toutes les voitures. Rien n’est laissé au hasard, tout est vérifié. Chaque jour, la gare d’Hakata accueille un balais incessant de passagers. Il faut dire que c’est l’une des plaque tournante du réseau ferroviaire japonais. Malgré l’affluence, tout se déroule dans le calme et de manière ordonnée. Dans les espaces publics, la discipline est maître-mot. C’est une vertu très appréciée des japonais, tout comme la propreté. Le personnel s’affaire en permanence pour maintenir les lieux impeccables.

À ce jour, le Japon enregistre des statistiques sur la situation sanitaire où le nombre de cas de COVID-19 et de décès sont très limités. Le pays enregistre peu de transmission: seulement 0,05% de sa population. La tendance du Japon est en fait de vouloir se protéger des autres pays. La transmission du virus est aussi moins importante car le Japon est un pays où, culturellement, on a toujours porté le masque, on ne se sert pas la main pour se saluer et on fait encore moins la bise. Ceci explique qu'à ce jour, le Japon connaît 3 fois moins de cas qu’au Canada avec une population 4 fois plus nombreuse. Consultez ICI la situation sanitaire actuelle au Japon.


Repartons sur l’île de Kyushu. Hakata est aujourd’hui la gare principale de Fukuoka. Les deux villes ont fusionné vers la fin du XIXe siècle puis Hakata est devenu en 1972 un arrondissement de Fukuoka. Le commerce avec le continent asiatique y est particulièrement développé. Entre les rangées d’immeubles sont installés de petits marchés où l’on vend du thé vert et, bien sûr, une grande quantité de poisson. En fin d’après-midi à Fukuoka, à l’heure de pointe, on ne croise pas que des gens qui rentrent chez eux. Une tradition de longue date est toujours bien vivante: chaque jour après 17 heures, de curieux attelages  circulent dans les rues et envahissent les trottoirs ; des marchands ambulants installent des stands qu’on appelle ici les yataï. En fin de journée, l’ambiance de la ville se détend peu à peu. Les yataï, ces échoppes de cuisine de rue, ont beaucoup de succès. Elles restent ouvertes une bonne partie de la nuit. C’est un lieu chaleureux où tout le monde se parle et se mélange. Voilà une manière conviviale  de passer la soirée avant de rentrer à la maison. Commence alors en quelque sorte une nouvelle heure de pointe vers minuit…

Le lendemain matin je quitte Fukuoka et son million et demi d’habitants. Je voyage à bord d’un train régional. Le Japon possède un vaste réseau ferroviaire. Il comprend d’une part le réseau à voies normales où circule le célèbre train ultra rapide Shinkansen (il relie Kyoto à Hakata en moins de 3 heures) et le réseau des trains express et régionaux. J’arrive à Yame, paisible petite ville de montagne, réputée pour son artisanat. Elle abrite un bel ensemble d’édifices anciens. On y découvre l’une des plus vieilles fabrique de lampions du pays. Les bandes  de papier washy sont collées puis peintes à la main sur les lampions. Ce savoir-faire reste inchangé depuis près de 200 ans. Un peu plus loin j’entre dans une autre boutique où l’on vend du thé vert de Yame. Un commerce qui se pratique aussi depuis plusieurs siècles. Plus qu’une simple boutique, ce lieu est une maison de thé convivial. Jadis, le thé vert était particulièrement recherché. Les clients venaient de partout au Japon pour le déguster dans ce décor raffiné. Le jeune propriétaire entend bien faire perdurer la tradition de la famille. De nos jours, me dit-il, on en produit des quantités, mais à l’époque, la cueillette se faisait entièrement à la main et le thé vert était une denrée plutôt rare. C’est pourquoi la production était assez limitée et le thé considéré comme une denrée  précieuse, d’où son prix élevé. Ici dans la boutique, comme dans la plupart des habitations, un autel est installé pour rendre hommage aux ancêtres de la famille. 

Changement de décor pour la prochaine étape de notre voyage. Petit retour à la gare de Hakata d’où partira notre prochain train. Avant de monter à bord du prestigieux Sept étoiles de Kyushu, nous patientons dans un salon feutré et luxueux qui nous rappelle une ambiance du début du XXe. Les billets de train se font poinçonner comme à l’époque. Tous les passagers les considèrent comme des pièces de collection. Avant chaque trajet, tout l’extérieur du train est lustré à la main. L’extérieur des panneaux laqués est du plus bel effet.

Avant d’embarquer, tout l’équipage se présente aux voyageurs. Le Sept étoiles n’est pas sans rappeler le légendaire Orient-Express: composé de 7 voitures, il accueille 30 passagers dans une ambiance cossue. Le luxe à la japonaise est synonyme de détails raffinés. Un décor très classique mais avec des toilettes ultra-électroniques à bord de chaque cabine ! Nous quittons Hakata. Peu à peu la ville fait place à la campagne. À bord, les chefs en cuisine venus des sept préfectures de Kyushu, concoctent les repas. L’ordre du service des repas est essentiel pour en apprécier les saveurs. Le maître d’hôtel veille au bien être de tous. Au cours du trajet, le train marque de brefs arrêts. Créé en 2013, le Sept étoiles s’inspire indéniablement des trains de luxe de la Belle Époque. Il roule à petite allure sur des voies secondaires permettant aux passagers de profiter pleinement des paysages. Au Japon ce voyage en train n’est pas seulement motivé par le plaisir de la bonne chère et des paysages. Il a une signification quasiment philosophique m’explique le chef de train : c’est un espace de sérénité où l’on peut réfléchir sur sa vie et son avenir. On sort de son quotidien pour vivre de nouvelles expériences. On crée des liens et fait connaissance avec les habitants de l’île. Au Japon, tous les trains de luxe affichent souvent complets malgré leurs prix onéreux.


Le voyage touche à sa fin et le lendemain matin nous embarquons à bord d’un autre train touristique : le Yufuin No Mori. Là aussi, l’accueil des passagers est particulièrement soigné même si cette fois, le prix des billets est tout à fait raisonnable. Conçu pour profiter au maximum du panorama, ce train est  équipé de sièges et de fenêtres surélevés. Nous arrivons dans une région touristique très appréciée. Ce train doit son nom à la station thermale de Yufuin, blottie au pied d’un volcan. La couleur verte des wagons fait écho à celle de la nature environnante. Contrairement au Sept étoiles, on ne trouve pas dans le train No Mori de wagon restaurant. Les japonais sont habitués  à manger sur le pouce dans la plupart des trains. On trouve des boîtes à bento à emporter à peu près dans toutes les gares et à bord. Ces bento sont délicieux et, comme toujours au Japon, l’emballage est extrêmement soigné. Le train s’enfonce toujours plus dans la forêt et traverse d’étroites vallées fluviales. Dans l’intérieur des terres, le relief s’accentue. On arrive dans des régions beaucoup moins peuplées. Nous nous arrêtons à Yufuin : c’est l’occasion de prendre un bain de pieds dans l’une des sources chaudes thermales qui font la notoriété de la station. Ici, la météo est très capricieuse et offre un spectacle toujours changeant. Dans les hauteurs montagneuses, plusieurs sources à ciel ouvert alimentent la station thermale. Partout se dégage une odeur de soufre liée à l’activité volcanique.

Situé au pied du est un  havre de paix niché dans la nature. L’auberge traditionnelle a été bâti au pied d’une source d’eau chaude aux vertus thérapeutiques: le onsen. L’aménagement intérieur du ryokan est  déjà une invitation à la détente. Qui plus est, les suites possèdent un bain thermal privatif. Élément incontournable de la culture japonaise, le onsenoffre une profonde relaxation pour le corps et l’esprit. Ma suite est aussi équipée d’un inori, cheminée typique dans les habitations traditionnelles. Ici, les repas sont de véritables rituels. Les mets japonais, tout en délicatesse, sont un régal pour les yeux et les papilles . À chaque service, on explique aux hôtes  la composition détaillée des différents plats et comment les déguster. Une parenthèse hors du temps, loin de la frénésie des villes.


Le lendemain matin, notre voyage se poursuit à bord d’un autorail régional. Nous prenons la direction du volcan Aso, sur une voie secondaire qui mène à la caldeira. C’est une ligne de train moins fréquentée qui traverse de très beaux paysages. Cet autorail est emprunté  presque uniquement par la population locale. Bref arrêt dans la petite localité Bungo-Taketa. Nous sommes au pied du volcan, l’un des plus actif du Japon. Aussi, mieux vaut cultiver la sérénité! Créé en 1934, le parc national Aso est le plus ancien du pays. C’est aussi devenue une zone naturelle protégée. Le mont Aso et ses fumerolles permanentes dominent la région. Ici s’y dresse  une quinzaine de cônes au sein d’une immense caldeira qui s’étend sur prêt de 130 km². Au beau milieu se trouve la ville d’Aso entourée de terres fertiles, de cascades, de gorges et de nombreux cours d’eau. Pause repas dans le restaurant de Mr Hideo Kinoshita. Il m’explique que dans la cuisine japonaise, on accorde une grande importance dans la célébration des saisons. Aux abords du restaurant, l’eau très pure qui s’écoule dans des canaux faits de bambous est omniprésente. Tout incite à la contemplation. Ce paysage idyllique est néanmoins fragile: n’oublions pas qu’en 2016, un violent séisme à secoué la région.

Nous regagnons la gare de Kumamoto où nous attends  le train à vapeur de Kumamoshi. L’ambiance est bonne enfant. Aujourd’hui, la plupart des régions possède son propre train touristique et il a toujours beaucoup de succès. Tous ces trains ont en commun de cultiver davantage la nostalgie d’une époque révolue, plutôt que le luxe. Les wagons du Kumamoshi, décorés à l’ancienne, disposent de tout le confort moderne mais de la plus ancienne locomotive à vapeur du Japon. Elle date de 1922. La ligne traverse la vallée du Kuma et le train longe le fleuve pendant deux bonnes heures. En queue de train la voiture panoramique permet d’apprécier la vue. Le fleuve Kuma est réputé pour ses rapides, très apprécié des amateurs de rafting. Autrefois cette ligne était l’une des principales voies de communication vers le sud de l’île. De nos jours elle sert essentiellement au trafic des trains régionaux et touristiques. Nous arrivons à la gare de Itoyoshi ou une pause gourmande nous attend. La région est connue pour ses sources thermales et aussi pour son eau de vie artisanale, fabriquée à base de riz : le chōchū, surnommée la vodka japonaise. Le processus de distillation est inchangé depuis deux siècles. Au Japon,  on cultive le respect des traditions, comme celui des aînés. Si la fabrication du chōchū est très ancienne, les rituels pratiqués au sanctuaire Aoiaso le sont encore plus. Situé non loin de Itoyoshi, ce temple shintô  a été fondé il y a quelques 1200 ans. Réputé pour ses toits de chaume remarquable, il a été classé trésor national. Retour à la gare d’itoyoshi. Notre train plonge littéralement dans la verdure. Ici des forêts denses caractérisent le paysage. Nous poursuivons toujours en direction du sud. En dehors des villes, la nature s’exprime en toute liberté. Dans la pittoresque gare d’Okoba, le train de deux wagons procède à une manœuvre de rebroussement : une marche arrière, un changement d’aiguillage, suivi d’une autre marche avant pour poursuivre son chemin.

Prochaine étape : Kagoshima. L’imposant volcan Sakuragima domine le paysage. Il s’élève  au milieu de la baie de Kagoshima, métropole de 600 000 habitants. C’est l’un des volcans les plus actifs du Japon. Le rejet permanent  des cendres et le risque permanent d’éruption n’empêche pas la population de vaquer à ses occupations quotidiennes dans cette ville ensoleillée où il fait bon vivre. Le tramway un brin vieillot n’en est pas moins performant. Kagoshima est une ancienne cité commerçante. C’était une véritable porte vers l’extérieur à l’époque où le pays c’est ouvert au monde à la fin du XIXe. Actuellement, faute de jeunes dans la ville, beaucoup de seniors s’occupent  de la circulation. En ville, la demeure de la famille Chimazu, célèbre dynastie d’industriels, symbolise la longue puissance commerciale  du Japon. Bâtie au XVIIe, la résidence est aussi réputée pour la beauté de ses jardins. Ayant été pendant longtemps la seule région en contact avec le monde extérieur, la ville joue encore un rôle économique et politique important.


Nous approchons de notre dernière étape, à la pointe sud de Kyushu. En train, nous longeons le bord de mer à bord du train express bicolore, le Ibusimi Tebako. La partie peinte en blanc se trouve toujours du côté mer et offre donc toujours les meilleurs sièges pour profiter du paysage. Nous sommes arrivés à l’extrême sud de l’archipel, à la station balnéaire de Inusiki. On la surnomme parfois le Hawaï japonais. Elle est célèbre pour ses bains de sable volcanique. Le sable est chauffé  par des sources thermales que chacun se doit d’essayer pour en ressentir les effets thérapeutiques avant de terminer le voyage.

Parfois insaisissable et toujours fascinant, le Japon demeure une terre de contraste. Les traditions ancestrales, comme les bains thermaux emprunts  de sérénité, y côtoient la modernité des villes effervescentes. La traversée du sud du Japon offre une multitude d’impressions qui se succèdent en permanence, entre villes et campagne, telles des images de kaléidoscope.


Espace sélect vous informe :


*Même si la rentrée sent la reprise, il est encore impossible de se rendre au Japon. Aucune prévision d'ouverture des frontières aux touristes n'a été émise par les autorités. Dès la réouverture des frontières japonaises aux touristes, Espace sélect vous proposera à nouveau ses séjours au Japon.


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À bord des avions pour le Japon:


Le Japon est à 10 000 km à vol d’oiseaux du Québec. Il faut compter quelques 12 heures d’avion en vol non-stop depuis Montréal. Comme la durée du vol le permet, je conseille souvent une escale à Vancouver pour se dérouiller les jambes. Air Canada et All Nippon, la compagnie japonaise, proposent des vols directs quotidiens depuis Montréal, Toronto et Vancouver. Le service est excellent. All Nippon offre des repas japonais à tous ses passagers dans toutes les classes et beaucoup d’espace à bord.


Je vous rassure: les experts scientifiques comparent les filtres à air des avions nouvelles génération à ceux de nos blocs chirurgicaux. « Une filtration d’air accrue grâce à des filtres à particules à haute efficacité éliminent 99,993 % des bactéries et virus», peut-on lire chez Transports Canada. À bord des avions – comme dans les trains-, le port du masque est obligatoire pour le moment.

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